lundi 21 juin 2021

Fête de la Musique 2021 : La Suave Melodia (Andrea Falconieri, 1650)

 

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La Suave Melodia (Andrea Falconieri, 1650)

Avec Falconieri, nous sommes aux portes de l'époque Baroque, et de son omniprésente basse continue. Pourtant cette magnifique mélodie qui porte si bien son titre a encore quelque chose de la Renaissance, comme un adieu un peu nostalgique à une autre époque, à une liberté musicale que l'on retrouve dans les diminutions, les improvisations mesurées, qu'elle invite à jouer.

Pour saluer cet adieu à la Renaissance, je me suis autorisé à ajouter un arrangement pour quatuor de flûtes à bec, d'après la basse continue de Falconieri.

Bonne fête de la Musique !

Nicolas FENDT : Flûtes à bec soprano, alto, ténor et basse, luth-guitare

samedi 5 juin 2021

Les Bouffons (d'Estrée, 1559 & Arbeau, 1589)

 

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Les Bouffons (Jean d'Estrée, 1559 & Thoinot Arbeau, 1589)

Les Bouffons est une danse de la Renaissance décrite par Thoinot Arbeau dans son Orchésographie (1589).

C'est une danse à figures qui se pratique en groupe de quatre danseurs portant épées et boucliers. En ce qui concerne la musique, Arbeau note que "L'air des Bouffons est notoire a un chacun" (sic).

En effet, c'est un "tube" de la Renaissance, issu certainement d'une chanson de l'époque (vraisemblablement "Ma peine n'est pas grande" de Janequin, 1545) et basé sur une basse répétitive (le Passamezzo Moderno ) que l'on retrouve dans de nombreux airs des 16ème et 17ème siècles.

Les Bouffons, avec sa mélodie simple, se prête, oblige même, aux diminutions, aux variations. Ici, c'est tout d'abord la version solo donnée par Thoinot Arbeau qui est jouée, où la polyphonie n'est que suggérée, puis la version à 4 voix de Jean d'Estrée (1559), reprise par Pierre Phalèse en 1571 (heureusement, car des livres de d'Estrée, on n'a retrouvé que le dessus et la basse…)

A lire (et à jouer), l'excellent livre : 50 Standards : Renaissance et Baroque, de Pascale Boquet et Gérard Rebours (ed. Fuzeau).

Je m'aperçois que j'ai mis un "s" à d'Estrée, dans la vidéo ... Toutes mes excuses, il n'était pas de la famille de Gabrielle d'Estrées, la favorite d'Henri IV, ce brave musicien dont on sait peu de choses finalement ...

Nicolas FENDT : veuze, cromornes, flûte à bec, bouzouki, luth-guitare, percussions.

jeudi 20 mai 2021

Cantiga 282 (vers 1280)

 

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Cantiga 282 (vers 1280)

Après la Cantiga 353 il y a quelques mois, voici la Cantiga 282, elle aussi propice aux improvisations instrumentales. Comme les autres Cantigas de Santa Maria, elle est attribuée au roi de Castille Alphonse X Le Sage (1221-1284).

Elle est connue sous le titre de "Par Déus, muit’ á gran vertude" ou même encore comme "Ai, Santa María, val !". Ses paroles racontent un miracle accompli par la Vierge Marie, qui sauve un enfant tombé du toit d'une haute maison.

Nicolas Fendt : vielle à roue, bouzouki, épinette des Vosges, luth-guitare, cromorne ténor, flûte à bec, percussions et arrangements.

dimanche 25 avril 2021

Passepiedz de Bretaigne (Praetorius, 1612)

 

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Passepiedz de Bretaigne (M. Praetorius, 1612)

Il est très curieux et presque émouvant de trouver ces musiques de danses bretonnes de la fin de la Renaissance, presque cachées dans un recueil (Terpsichore) publié pour la petite cour de Wolfenbüttel, en Allemagne, par Praetorius, en 1612. On ne peut que remercier les informateurs français de Praetorius, qui, lui, les a arrangées à 5 voix …

Et on retrouve ces musiques, qui devaient être populaires, dans le manuscrit de Philidor "Recueil de vieux airs", en 1690 (juste accompagnées d'une ligne de basse).

Les passepieds sont également cités par Mme de Sévigné, toujours en 1690, lors d'un séjour au Château des Rochers-Sévigné, près de Vitré (Ile et Vilaine) : "Après souper, tout dansa : il y eut des sonnoux, on dansa tous les passe-pieds, tous les menuets, toutes les courantes de village, tous les jeux des gars du pays."

Ces mélodies sonnent tout à fait comme dans la tradition bretonne, et elles ne dénoteraient pas dans un Fest-Noz actuel, même si, à leur époque, ces danses étaient destinées avant tout à la haute société. Le passepied est resté dans la tradition bretonne, avec des musiques différentes de celles-ci (Pach pi, passepieds du Trégor ou de Haute Bretagne, etc …).

La veuze, cornemuse de l'Est et du Sud de la Bretagne, et de Vendée, s'impose dans ces morceaux ; avant les binious actuels, elle était vraisemblablement répandue dans toute la Bretagne, en descendante des cornemuses médiévales. D'ailleurs, les sonnoux de Mme de Sévigné en jouaient certainement ...

 Nicolas FENDT : Veuze, hautbois de Poitou, chalémies de berger alto et ténor, cromornes soprano et basse, flûte médiévale, percussions.

vendredi 9 avril 2021

Putta Nera Ballo Furlano (Mainerio, 1578)

 

 
 
Putta Nera Ballo Furlano (Giorgio Mainerio 1578, Il Primo Libro di Balli
 
La personnalité du compositeur de cette musique, Giorgio Mainerio, est très romanesque et un peu sulfureuse. Prêtre, d'origine écossaise (il signait ses œuvres du nom de son père : Mayner), il a été inquiété par l'Inquisition à cause de son intérêt pour l'occultisme (astrologie, magie et nécromancie).
 
Il a composé beaucoup d'œuvres religieuses, mais son recueil le plus connu est Il Primo Libro di Balli, l'un des rares livres de danses italiennes de son époque, dans lequel il livre des morceaux aux titres plus ou moins énigmatiques (comme le fameux Schiarazula Marazula, transcription d'une danse de la pluie des femmes de sa région) ou évocateurs, comme cette Putta Nera Ballo Furlano.
 
Ballo Furlano, c'est une danse du Frioul, partie de la Vénétie de l'époque, habitée par des populations d'origine slave. Plus tard, elle donnera la forlane, bien connue à l'époque baroque. Quant à la Putta Nera… Mainerio ne va pas jusqu'à nous indiquer son nom, ni comment il a pu la connaître… Est-ce que, comme Esmeralda, elle l'avait envoûté en dansant ce Ballo Furlano un peu bohémien ?... On peut l'imaginer… Quoi qu'il en soit, cette musique très dansante a eu un certain succès, puisqu'elle a été reprise dès 1583 par l'éditeur anversois Pierre Phalèse, dans la seconde édition de son recueil de danseries.
 
Nicolas FENDT : vielle à roue, cromornes soprano, alto, ténor et basse, flûte à bec sopranino, luth-guitare, percussions.

mercredi 17 mars 2021

Happy St Patrick's Day : Carolan's Welcome (O'Carolan, vers 1700)

 

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Carolan's Welcome (Turlough O'Carolan, 1670-1738)

Le célèbre harpiste irlandais O'Carolan a composé un grand nombre de musiques, aux sonorités à la fois baroques et traditionnelles de son pays. C'est ce qui en fait leur grand intérêt et leur charme.

Il était aveugle, et n'a laissé aucune partition (savait-il écrire la musique ?) ; ses œuvres se sont transmises par tradition orale, et ont été publiées après sa mort dans des livres rassemblant les morceaux qu'il jouait, ou qui lui ont été attribués, sous la forme de simples lignes mélodiques (ce qui ouvre de nombreuses possibilités d'arrangements).

Presque toutes ses œuvres portent un titre, souvent en hommage à l'un de ses employeurs. Il en existe un petit nombre sans titre, dont cette très jolie mélodie, maintenant appelée "Carolan's Welcome" depuis que les Chieftains l'ont nommée ainsi dans les années 70. Happy St Patrick's Day ! *

Nicolas Fendt : Flûtes à bec, luth-guitare, mandole et arrangements.

dimanche 28 février 2021

Bransles de Champaigne (Claude Gervaise, 1555)

 

 
Bransles de Champaigne Claude Gervaise, livre VI, 1555 
 
Les branles de Champagne sont des danses du 16ème siècle, mais ne sont pas spécialement originaires de la région Champagne : comme l'indique Thoinot Arbeau, ces musiques peuvent aussi bien être appelées branles de Bourgogne que branles de Champagne.
 
Ce sont des branles doubles, mais Thoinot Arbeau précise que ces danses s'adressent aux plus jeunes danseurs des bals de son époque, qui les dansent "légèrement". Ils sont plus vifs que les branles doubles normaux, qui, eux, sont dansés "gravement" par "les anciens".
 
Nicolas Fendt : Vielle à roue, Luth-guitare, Cromornes soprano, alto et basse, Flûtes à bec sopranino, alto, ténor et basse.

vendredi 15 janvier 2021

Gavottes (Caroubel - Praetorius, 1612)

 

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Gavottes (Caroubel - Praetorius, 1612)

En 1612, Praetorius publie le recueil "Terpsichore", rassemblant une somme irremplaçable de danses françaises de son époque, à 4 ou 5 voix. Il indique dans sa dédicace à son employeur (le Duc de Brunswick, à Wolfenbüttel ) que ces mélodies ont été achetées par le Maître de ballet de la cour, un Français, Antoine Emeraud, essentiellement à des violonistes français.

Un de ces violonistes de la cour de France collabore avec lui pour cet énorme travail : Pierre Francisque Caroubel, qui a passé quelques temps à la cour de Wolfenbüttel en 1610. On ne sait pas exactement qui a arrangé, ou même composé, telle ou telle mélodie, mais la grande suite de branles et gavottes français qui ouvre l'ouvrage est attribuée à Caroubel. Voici ici 4 de ces gavottes.

Nicolas FENDT : cornemuse, cromornes, Rauschpfeifen, hautbois de berger, flûtes à bec, mandole, mandoloncelle, luth-guitare, percussions

mercredi 6 janvier 2021

Welscher Tantz Wascha Mesa (Neusiedler, 1536)

 

Welscher Tantz Wascha Mesa (Hans Neusiedler, 1536) 

Voici encore un morceau écrit à l'origine pour luth seul, mais dont la richesse permet un arrangement pour plusieurs instruments (pratique courante à la Renaissance, d'ailleurs).

Il porte un titre énigmatique, et a des réminiscences de musiques des pays de l'Est. Après tout, Neusiedler était né à Pressburg, l'ancien nom de Bratislava, en Slovaquie, avant de faire sa carrière de luthiste (et luthier) à Nuremberg, en Allemagne …

Welscher Tantz : c'est l'origine de la danse. Ces mots signifient : danse étrangère, d'un pays étranger. Wascha Mesa : plusieurs interprétations sont possibles, et peuvent se compléter … Déformation du mot "Passamezzo" (ce qu'est en réalité cette musique), déformation des mots polonais " Wasze Miejsce", que l'on peut traduire par "votre place", là où vous êtes, d'où vous venez… Expression-valise signifiant aux polonais de Nuremberg : danse de votre pays ?... Le mystère plane… Mais on sait que Neusiedler a également composé une Judentantz au caractère très étrange elle aussi…

La mélodie demeure, avec son rythme bien à elle (qui rappelle certaines Scottishs des bals folk…). La musique d'origine était suivie d'une variation ternaire qui n'est pas jouée ici.

Nicolas FENDT, flûtes à bec soprano, ténor et basse, cromorne basse, luth-guitare, bouzouki irlandais, tambour et tambourin